J’ai découvert la maison de l’architecte et designer Carlo Mollino par une matinée ensoleillée d’octobre. Une lumière vaporeuse flottait sur le Pô. Turin se réveillait doucement.
Fulvio Ferrari, qui a racheté l’appartement du designer il y a 25 ans, m’a accueillie dans cette demeure hors du temps, où les rais d’une lumière matinale éclatante venaient accentuer subtilement la poésie du lieu.
L’appartement ne fut jamais occupé par Carlo Mollino : il mit huit années à le meubler, jusqu’à sa mort en 1973. Chaque objet a été choisi minutieusement et a été disposé à un endroit bien défini, répondant à la maxime du designer selon laquelle « tout fait sens ». Pas d’esthétique gratuite pour le créateur du Teatro Regio.
Fulvio et son fils gèrent ensemble la maison. Respectivement ingénieur chimiste et philosophe, ils ont tout abandonné pour s’occuper du lieu et déchiffrer l’énigme de cet appartement gardé secret par Mollino.
Au terme de leur investigation, ils ont découvert que le designer l’avait entièrement préparée pour sa vie dans l’au-delà, à la manière des pharaons égyptiens. Carlo Mollino a multiplié les références à l’Egypte Ancienne, telle la table de salle à manger en forme de sarcophage. Libre penseur, il s’est également inspiré du bouddhisme et de l’Antiquité grecque pour créer sa dernière demeure.
Ecrin raffiné, maison spirituelle, l’endroit se visite en silence. L’oeil est happé par les jeux de lumière, l’oreille se laisse guider par le murmure du fleuve non loin.
